Souffrance au travail, situations de harcèlement, managements particulièrement agressifs et autoritaires, accidents de travail et parfois plus grave encore, décès… autant d’absurdités que notre administration n’aurait jamais dû rencontrer.
Ces situations en ont commun l’absence d’un document pourtant obligatoire : le Document Unique d’Evaluation des Risques Professionnels plus souvent appelé par son acronyme DUERP.
Qu’est-ce que le DUERP ?
Le DUERP est un document synthétisant une étude réalisée dans le service ou l’établissement sur les risques professionnels auxquels peuvent être confrontés les agents.
Au-delà du recensement des risques, aussi minimes soient-ils, ce document doit également mettre en face de chacun d’eux une réponse de l’administration pour s’en prémunir.
La loi n’encadre pas la forme exacte que peut prendre ce document. Il peut s’agir d’un document WORD, d’un fichier EXCEL, d’une présentation POWERPOINT, d’une page WEB, peu importe.
En revanche, la loi impose que ce document soit accessible à tous les agents et structures syndicales qui le réclameraient. Il s’impose à toute structure économique ayant des employés, dans le secteur privé comme dans le secteur public.
S’agissant d’un document contraignant relatif aux règles d’hygiène et de sécurité, il doit obtenir l’aval du Comité Technique Paritaire. Depuis 2018, l’absence de ce document dans les services et les établissements publics engage ministres, chefs de service ou directeurs d’établissement devant la loi et les soumet à une condamnation de 5ème classe.
Enfin, et non des moindres, ce document est opposable juridiquement en cas d’accident ou de survenue d’une situation détériorant la santé des agents.
Comment s’élabore-t-il ?
Ce document est avant tout le fruit d’une étude approfondie auprès de tous les agents du service. Cette étude vise à décortiquer ce que fait chacun dans son quotidien au travail et à déceler pour chacune des tâches, les risques potentiels.
Ces risques vont des troubles de la vision ou du mal de dos pour ceux qui passent leurs journées devant un ordinateur, à des risques plus importants pour ceux amenés par exemple à parcourir des distances entre deux atolls en poti marara ou à manipuler des produits dangereux.
Le DUERP ne se focalise pas que sur les risques physiques. Ce document doit également couvrir les risques psychologiques.
Les risques psychologiques sont multiples dans une administration. Ils peuvent résulter d’insultes répétées d’usagers mécontents, ils peuvent être induits par la pression qu’imposeraient certaines hiérarchies pour influer sur une décision technique, et bien évidemment, il peut aussi s’agir du harcèlement.
Les risques recensés sont en général classés dans une grille qui croise leur fréquence d’occurrence et leur gravité.
Gravité du risque | ||||
Faible | Moyenne | Elevée | ||
Fréquence du risque | Haute | |||
Moyenne | ||||
Faible |
De multiples formes existent pour qualifier ainsi les risques, comme par exemple des scores attribués : fréquence, gravité et nombre d’agents potentiellement concernés.
1 | 2 | 3 | 4 | 5 | 6 | 7 | 8 | 9 | 10 | |
Gravité | ||||||||||
Fréquence | ||||||||||
Nombre d’agent |
Plus les risques sont fréquents, graves et étendus en nombre potentiel d’agents impactés, plus l’administration se doit d’y apporter des solutions immédiates. C’est de la simple rationalité.
Ainsi, le document recense chacun des risques, lui attribue un score en terme de fréquence, de dangerosité et de nombre d’agents touchés, puis présente les actions prises (ou à venir) pour le réduire.
Recenser les risques, mais surtout s’en prémunir
Le Document Unique d’Evaluation des Risques Professionnels doit impérativement faire apparaître les solutions que propose le service ou l’établissement pour s’en prémunir.
Il peut s’agir de formations régulières, d’achat de mobilier ergonomique, d’écrans de protection, mais également de la mise en place d’une écoute particulière de la souffrance au travail.
Il ne peut pas s’agir de simples « bonnes intentions ». Lorsque l’administration indique « nous allons… » elle doit impérativement indiquer qui va et quand l’opération aura lieu.
C’est la raison pour laquelle le DUERP doit être daté et actualisé en permanence !
De nouveaux risques surviennent et parallèlement l’administration fait des efforts pour les prémunir. Toutes ces modifications doivent systématiquement apparaître dans le document.
Ce qui est aujourd’hui indiqué comme « nous allons… » doit immanquablement se transformer dans un futur proche comme « Voilà la solution apportée ».
Rester vigilant
L’écriture du DUERP n’est donc pas une fin en soi. Il s’agit d’un document qui doit vivre. A chaque évolution de l’organisation, à chaque modification de processus, la question du DUERP doit se poser.
Au moins une fois par an, représentants du personnel et de l’administration doivent relire le DUERP et se poser la question de son actualisation.
Un document opposable juridiquement
L’absence de DUERP est un fait aggravant en cas d’accident ou de problème de santé des agents. En effet, sans celui-ci, les agents n’ont pu être légalement informés des risques qu’ils encouraient et des solutions mises à leur disposition pour s’en prémunir.
Lorsque l’affaire éclot devant les tribunaux, la question qui se pose devant le juge est celle du caractère intentionnel ou non de l’absence de ce document.
S’il est possible de prouver que le directeur ou chef de service a intentionnellement manqué à ses obligations, sa responsabilité est bien évidemment aggravée.
Une action syndicale déterminée
Notre syndicat tente aujourd’hui de simplifier une bonne fois pour toute cette problématique. Car bien évidemment, toutes les personnes mises en cause tentent de plaider leur ignorance.
Nous avons donc exigé la transmission des DUERP de tous les services et établissements afin de s’assurer que ces documents existent bel et bien.
Nous avons ciblé en priorité les services et établissements dans lesquels des problèmes sérieux étaient survenus. Le moins que l’on puisse dire, c’est que la vacuité est immense !
Rares sont les services ou établissements à avoir pris la mesure de leurs obligations. Il est vrai que jusqu’à présent, paradoxalement, aucun ministre en charge de la fonction publique n’a exigé d’eux qu’ils respectent leurs obligations et la réglementation !
Dès lors, comme notre courrier de demande rappelle le caractère obligatoire du document, plus aucun chef de service ou directeur d’établissement ne peut se réfugier derrière l’ignorance !
Cette démarche qui peut sembler agressive ne poursuit en réalité qu’un seul objectif : réduire la souffrance des agents au travail en obligeant les responsables à se poser les bonnes questions.
Nous allons par ailleurs lancer une floppée de procédures devant les tribunaux pour que les directeurs d’établissement et chefs de services négligents soient confrontés à cette condamnation de 5ème classe !
Nous pensons Madame la Ministre de la Fonction Publique parfaitement sincère lorsqu’elle indique vouloir elle-aussi réduire la souffrance au travail dans notre administration. Notre action poursuit ainsi la même intention avec toutefois l’objectif supplémentaire d’accélérer le processus.
Nous vous rappelons que nous sommes à votre disposition pour tout problème que vous pourriez rencontrer, que vous soyez affilié(e) ou non à notre centrale.