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Notre système de retraite est aujourd’hui en situation très difficile. Ce n’est malheureusement pas récent, mais personne ne semble avoir voulu prendre les décisions douloureuses qui s’imposaient lorsqu’il le fallait. Pour tenter de remédier au problème, le gouvernement se lance dans une soi-disant profonde réforme fiscale. Celle-ci repose toujours sur le même dogme : « pas d’impôt sur le revenu », et de manière plus large, protéger la situation des plus hauts revenus. Il risque de découler de tout cela des inégalités sociales accrues et une classe moyenne, ou ce qu’il en reste, qui pourrait basculer en mode survie.

Retraites, une responsabilité partagée

Il faut, en premier lieu, rappeler que la Caisse de Prévoyance Sociale n’est pas gérée par le gouvernement même si ce dernier en nomme le directeur et le comptable. La CPS est gérée de manière paritaire par les représentants des employeurs et des salariés.

Cependant, en validant de manière quasi systématique les délibérations du conseil d’administration de la CPS, le gouvernement partage la responsabilité de la situation actuelle.

Le ministre de l’Économie et des finances souhaite que le gouvernement reprenne les choses en mains. Cela peut se comprendre, mais il n’est pas certain pour autant qu’il fasse les meilleurs arbitrages.
Depuis de nombreuses années, malgré des signaux d’alarme de plus en plus insistants, notre protection sociale est restée en surrégime.

Les salariés de la CPS relèvent du droit privé. Ils sont payés par nos cotisations et jouissent d’avantages dont peu de salariés bénéficient, que ce soit dans le secteur public ou le secteur privé. Dès lors, qu’est-ce qui peut justifier que des personnes payées par nos cotisations puissent bénéficier d’avantages coûteux que n’ont pas la très grande majorité des cotisants ?

Les représentants des organisations patronales et salariales qui siègent dans les conseils d’administrations de la CPS bénéficient eux aussi de très beaux avantages. Nous avons connaissance de représentants syndicaux qui ont largement profité de leur siège au sein du conseil d’administration de la CPS pour bénéficier de soins onéreux quasiment non remboursés, et ce, aux frais des cotisants. Cela interroge encore sur ces avantages pris en charge par les cotisants ?
La situation actuelle et le contexte que nous connaissons n’est pas le fruit de la fatalité. Il résulte de décisions qui ont été prises il y a parfois bien longtemps ou, au contraire, de décisions courageuses qui n’ont jamais été prises.

Retour sur la chronique d’une catastrophe annoncée

Un organisme social comme la CPS n’a absolument pas le droit d’engager les cotisations sociales dans des placements risqués. C’est une règle statutaire.

Pourtant, cela n’a pas empêché l’institution de réaliser, au début des années 2 000, des placements hasardeux dans FORTIS, une excroissance de la banque BNP, et d’y laisser des plumes de manière considérable. Le comptable de la CPS est normalement redevable sur ses deniers personnels pour ce type d’erreur de gestion. Mais en l’occurrence, pas la moindre inquiétude.

La CPS a également participé à des investissements colossaux dans la compagnie ATN sans que cet argent ait été remboursé ou qu’il ait engendré des dividendes. Certains membres du conseil d’administration se dédouanent de ce choix en disant que les emplois de la compagnie ont généré de très nombreuses cotisations. Pourtant, une règle est une règle et ATN aurait de toute façon vu le jour même sans les fonds de la CPS.

La PSG et son financement

Puis il a fallu supporter la PSG (Protection Sociale Généralisée). Pour conserver l’équilibre, le gouvernement n’a pas hésité à puiser des milliards dans la caisse de retraite pour alimenter l’assurance maladie. Que ces sommes soient aujourd’hui remboursées ou non, on ne jongle pas comme cela avec les cotisations retraites.

Aujourd’hui, le régime des retraites est déficitaire d’environ 32 milliards de F.CFP. Cela correspond à peu près à une année de masse salariale de la fonction publique territoriale.

Lorsque la Protection Sociale Généralisée fut mise en place il y a environ 20 ans, la situation économique était encore relativement favorable. Philosophiquement, il paraissait logique que tout citoyen puisse voir ses soins pris en charge, qu’il ait cotisé ou non. La dépense bénéficie donc à tous, mais la recette est principalement constituée par les cotisations des salariés, dans une bien moindre mesure par celles des non-salariés, puis par la CST et quelques taxes. Le régime des retraites est quant à lui financé par les cotisations des salariés. L’effort demandé aux cotisants est donc devenu très substantiel. Avec la crise économique, cet effort est devenu difficilement soutenable.

Logiquement, si la santé profite à tous, elle doit être financée par tous et pas seulement par les salariés. Dès sa constitution, la PSG aurait dû être financée via la fiscalité, et si possible par celle reposant davantage sur les revenus des plus riches pour plus d’égalité sociale. En maintenant le financement de ce dispositif essentiellement sur les salariés, les décideurs ont scié la branche sur laquelle nous étions tous assis.

Le copier-coller habituel de la métropole

Pour tenter d’enrayer l’hémorragie, le gouvernement a cru bon de faire un copier-coller des choix métropolitains en reculant l’âge de départ à la retraite, en allongeant la durée de cotisation et bien évidemment en augmentant considérablement les taux d’abattements pour celles et ceux qui souhaitent partir à la retraite par anticipation. Parallèlement, les taux de cotisations continuent également de progresser.

Aujourd’hui, pour renflouer la caisse, il est question d’une TVA dite « sociale ». Qu’on se le dise, la TVA est l’impôt le moins social qui existe, puisqu’en proportion, il pèse bien plus lourdement sur les bas revenus que sur les hauts revenus. Parler de TVA « sociale » est donc une ineptie. Le seul avantage de ce type d’impôt est que son assiette est très large et qu’il rapporte beaucoup et rapidement.

Par ailleurs, n’est prévue aucune déductibilité de la taxe entre les différents intervenants avant la vente finale. Il ne s’agit donc absolument pas d’une Taxe sur la Valeur Ajoutée, mais d’une simple taxe sur les ventes. Il y a derrière cela un risque inflationniste dont les conséquences peuvent être favorables pour la fiscalité, mais désastreuses pour notre pouvoir d’achat.

Pour tenter de renouer avec l’équilibre, avant même de chercher à réduire la dépense, le gouvernement cherche à accroître les recettes ! Ne serait-il pourtant pas plus vertueux de chercher à rationnaliser les dépenses avant d’accroître les recettes ?

Bonne ou mauvaise hygiène de vie, peu importe

Mettons immédiatement de côté les accidents de la vie, les fragilités génétiques et autres problèmes de santé que nous pouvons tous rencontrer indépendamment de notre comportement.

Un individu qui prend soin de sa santé par une bonne hygiène de vie, une alimentation équilibrée et de l’exercice, verse à salaire égal, autant de cotisations qu’un individu qui fume abondamment, boit de l’alcool, mange de manière déséquilibrée et met donc sa santé en danger.

Le premier a un comportement qui permet potentiellement à la CPS de faire des économies alors que le second fait courir le risque de fortes dépenses.

Ne serait-il pas temps de responsabiliser les usagers que nous sommes ? Ne serait-il pas temps de trouver des dispositifs incitatifs pour appeler chacun à faire un effort pour réduire nos dépenses de santé ?

Nous sommes 280 000 habitants, pas des millions. Il y a donc la possibilité de passer un contrat avec chacun et d’envisager des programmes de prévention presque individualisés. Pourquoi ne pas accorder à chaque individu un coefficient de risque sur ses cotisations ? Ce coefficient viendrait alors alourdir, ou au contraire réduire, le niveau de cotisation en fonction de l’effort fait pour réduire la dépense collective.

Le taux de remboursement actuel des soins et des médicaments est très élevé. Sans doute faudrait-il commencer par le réduire. C’est l’occasion de rappeler que la santé n’est pas un service comme les autres et qu’il mérite de la part de chacun une attention particulière. Il nous paraît aujourd’hui important d’avoir une véritable approche sociale, y compris dans le remboursement des soins. Il serait tout à fait possible d’envisager que plus on dispose de revenus élevés, moins les soins quotidiens soient remboursés.

Là encore, nous écartons de notre réflexion les maladies chroniques et les gros incidents de la vie.

Les prix des médicaments sont aujourd’hui relativement importants. Plus ils sont élevés, plus la CPS doit les rembourser. Les prix des médicaments sont fixés par rapport à leur coût d’arrivée sur le territoire, coût sur lequel on applique un coefficient. La marge ainsi créée se partage entre grossistes et officines. Or il semble difficile de considérer que les grossistes en médicaments et les pharmacies soient des parents pauvres du système de santé. Par conséquent, sans doute conviendrait-il de réduire le prix des médicaments et donc les marges des grossistes et détaillants.

Quant au système de retraite, son rééquilibrage passe immanquablement par la fiscalité, et bien évidemment, par une pression plus forte sur les hauts revenus ! Les plafonds de cotisation doivent impérativement disparaître. Nos élus doivent eux-aussi passer par la case déclaration auprès de la CPS et y verser leurs cotisations.

La fusion des tranches A et B

Le gouvernement réfléchit à fusionner les tranches A et B. La tranche B est celle qui est payée par les plus hauts revenus, et donc ceux qui potentiellement devraient bénéficier de meilleures retraites. Il est en effet logique que plus un individu a cotisé, plus sa retraite soit élevée.

Le risque de cette fusion est de voir un nivèlement par le bas et un aplatissement total des retraites. Dès lors, tous ceux qui ont cotisé au régime de la tranche B pendant des années, voire des dizaines d’années, pourraient voir leur retraite considérablement amputée.

Une réforme fiscale dont les contours montrent que les dogmes sont tenaces

Lorsque le ministre des finances a sollicité une étude pour la réforme fiscale, la condition était : « pas d’impôt sur le revenu ». Ce choix de nanti est un dogme inepte, surtout lorsqu’il s’agit de parler de rééquilibrage social.

Toute taxe indirecte est par essence antisociale car elle pèse proportionnellement plus lourdement sur les revenus modestes que sur les hauts revenus.

Par ailleurs, il est prévu la mise en place d’un impôt sur les successions avec des règles drastiques lorsque les héritiers ne peuvent payer cette taxe sur leur héritage. Il semble en effet, que le gouvernement souhaite proposer en pareil cas, la possibilité pour l’administration de vendre de force les biens pour en encaisser l’impôt. Que se passera-t-il lorsqu’une fratrie héritera d’une terre évaluée pour des sommes importantes et qu’elle devra payer un impôt très conséquent ? Si aucun des héritiers ne peut assumer la dépense, leur terre sera vendue contre leur gré et ils encaisseront des miettes.

Bien des personnes qui seront concernées ne participent pas à la spéculation foncière car elles n’ont pas les moyens d’acheter. Cependant, elles en seront victimes au moment de l’héritage lorsque leurs terrains seront évalués pour la taxation.

Nous risquons alors d’avoir des hordes de personnes qui, au lieu de pouvoir construire sur une terre qu’ils héritent de leurs ancêtres, n’auront d’autre choix que d’alimenter les lotissements sociaux, voire les bidonvilles, tout en regardant des nantis s’installer sur les terres de leurs aïeux.

Belle leçon de social de la part d’une caste de nantis qui trouvera certainement la parade pour échapper à ce dispositif. Elle trouvera là le moyen de racheter dans de bonnes conditions des terres à des futurs hotu painu.

L’appel des syndicats à la grève générale

Les syndicats qui risquent de se voir privés de leurs sièges au sein de la CPS et des avantages qui s’y rapportent, appellent à une grève générale. Les contours des revendications sont flous, mais une chose est quasi certaine, leur motivation principale est sans nul doute de faire pression sur le gouvernement pour conserver leurs prérogatives au sein de la CPS.

Ces centrales ont été aux commandes de la CPS pendant toutes ces années, elles devraient davantage s’interroger sur leurs propres responsabilités plutôt que d’instrumentaliser des salariés déjà victimes.
Notre syndicat ne participera donc pas à ce mouvement.

Nous vous rappelons que nous défendons tout agent de la fonction publique, que vous soyez adhérent ou non, même si nous accordons logiquement priorité aux dossiers de nos adhérents. N’hésitez donc pas à nous contacter si besoin.